PTZ, LMNP, Succession : Le Sénat remanie le volet logement de la Loi de Finances 2025

PLF 2025 : Les amendements adoptés par le Sénat pour le logement

Toulouse - Politique - Morgane Caillière le 02/12/2024

Le 29 novembre 2024, les sénateurs ont adopté plusieurs amendements au projet de loi de finances 2025 sur le volet "aide au logement".

Extension du PTZ à tout le territoire, exonération temporaire de droits de succession, LMNP... ces votes, portés par Jean-François Husson, recalibrent les orientations du gouvernement Barnier qui priorisait le soutien au logement neuf, dans un contexte marqué par des tensions politiques croissantes autour du budget 2025.

Le PTZ élargi à tout le territoire pour le neuf ET l’ancien

Le Sénat a voté un amendement visant à élargir le prêt à taux zéro (PTZ) à l’ensemble du territoire, incluant à la fois les logements neufs et les logements anciens nécessitant des travaux de rénovation énergétique. Cette extension concerne également les zones dites "détendues", où la demande immobilière est plus faible, permettant ainsi un retour à des conditions d’accès plus inclusives, comparables à celles d'avant les restrictions de 2023.

Cette année, le PTZ a profité à 40 000 bénéficiaires par an, contre plus de 124 000 en 2017, en raison de critères d’éligibilité jugés trop restrictifs. L’amendement voté par le Sénat pourrait rendre le PTZ accessible à un plus grand nombre de primo-accédants, contribuant à revitaliser l’accession à la propriété dans des zones moins prisées et à encourager la rénovation énergétique des logements anciens.

L’adoption de cette mesure était attendue. Dès son entrée en fonction à Matignon, Michel Barnier avait exprimé, lors de son discours de politique générale, son intention de rétablir le PTZ à l’échelle nationale.

Cependant, les amendements votés par le Sénat, qui restaurent les conditions initiales du dispositif, diffèrent de la vision portée par le gouvernement. Le ministre des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, avait proposé une extension du PTZ à tout le territoire, mais uniquement pour la construction de logements neufs, excluant ainsi les projets de rénovation.

Selon Jean-François Husson, sénateur Les Républicains et rapporteur général de la commission des finances, la rénovation des logements anciens représente un enjeu majeur. « Elle s’inscrit dans une démarche essentielle de sobriété foncière », affirme-t-il, justifiant ainsi le maintien du PTZ pour ces projets.

3 mois supplémentaires confirmés pour le dispositif Pinel

Le dispositif Pinel, qui permet de bénéficier de réductions d'impôt en investissant dans l'immobilier locatif neuf, devait initialement prendre fin au 31 décembre 2024.

Sur ce sujet qui affole les professionnels de la construction neuve, le Sénat a voté, dans la droite lignée de la commission des finances de l’Assemblée, une prolongation exceptionnelle jusqu'au 31 mars 2025.

Attention, cette mesure s’adressera uniquement aux investisseurs ayant réservé un logement avant la fin de l'année 2024, leur permettant de finaliser l'achat durant les 3 premiers mois de l'année 2025.

Lors de la publication des chiffres d’activité du second trimestre 2024, la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI) avait pourtant alerté sur les conséquences d’un abandon du dispositif. « 85 à 90 % des investissements locatifs des particuliers » dépendent du Pinel, et les ventes dans ce secteur sont déjà quatre fois inférieures à celles d’une année normale.

Malgré la plaidoirie de Pascal Boulanger (président de la FPI) et ses déclarations en faveur d’un retour du dispositif Pinel à ses taux initiaux de réduction d’impôt (12 %, 18 %, et 21 %), le Sénat a adopté une prolongation exceptionnelle bien plus limitée.

Succession & donation : Jusqu'à 100 000 euros exonérés

signature dans le bureau d'un homme de loi
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Les sénateurs ont adopté une mesure d'exonération temporaire des droits de succession. Entre le 1er janvier 2025 et le 31 décembre 2026, les dons d'argent visant à financer l'achat, la construction ou la rénovation d'un logement bénéficieront d'une exonération fiscale à hauteur de 100 000 euros, sous réserve que le bénéficiaire conserve le bien pendant au moins trois ans.

Cette disposition s’écarte de l’amendement adopté par la commission parlementaire des finances le 17 octobre 2024. Ce premier texte, porté par le gouvernement et soutenu par le ministre des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, privilégiait une approche axée sur la relance du secteur de la construction neuve, jugé prioritaire pour répondre à la crise du logement. La version élargie votée par le Sénat inclut également les logements anciens, dès lors qu’ils font l’objet de travaux de rénovation.

Loueur Meublé Non Professionnel (LMNP) : des ajustements fiscaux

Le régime de la location meublée non-professionnelle (LMNP), prisé pour ses avantages fiscaux, subira des changements en 2025, quoi qu'il arrive. L'amendement adopté par le Sénat introduit l'intégration de l'amortissement comptable dans le calcul des plus-values de cession augmentant ainsi l’impôt sur la revente des biens concernés.

Des exclusions ont toutefois été prévues par les sénateurs pour certains types de logements, comme les résidences seniors et étudiantes, jugées essentielles dans le contexte actuel. Les établissements pour personnes âgées ou handicapées, ainsi que les résidences de tourisme, bénéficient également de dérogations.

Jusqu’à fin 2024, le régime de la location meublée non professionnelle (LMNP) offre aux investisseurs la possibilité de déduire l'amortissement comptable de leurs biens de leurs revenus locatifs, réduisant ainsi leur base imposable. Lors de la revente du bien, ces amortissements ne sont pas réintégrés dans le calcul de la plus-value immobilière, ce qui permet de diminuer l'impôt dû sur la cession. Jusqu'ici, cette particularité fiscale rendait donc le statut de LMNP particulièrement attractif pour les investisseurs cherchant à optimiser leur fiscalité.

La location de logements nus : un alignement avec le meublé

Pour répondre à la raréfaction des logements nus sur le marché locatif, les sénateurs ont adopté un amendement visant à porter à 50 % l'abattement fiscal du régime micro-foncier, actuellement fixé à 30 % ; un taux qui devra donc être aligné avec celui des meublés de tourisme classés, promulgué par la loi « anti-Airbnb ».

La mesure a pour ambition d’enrayer le déclin rapide des locations nues, divisées par deux en seulement quatre ans. En complément de la loi dite "Anti AirBnb" portée par Annaïg Le Meur et Inaki Echaniz, cet amendement vise à rééquilibrer le marché locatif, largement dominé par les meublés touristiques.

Par ailleurs, un amendement propose de réformer l'imposition des plus-values immobilières, réduisant le taux effectif de 36,2 % à 15 % après deux ans de détention, ( tout en pénalisant les cessions rapides avec un taux plus élevé. Des dispositions qui tendent à encourager les détentions longues et à stabiliser le marché de la location.

Calendrier de la suite

une réunion politique
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Le parcours législatif du projet de loi de finances pour 2025 est loin d’être achevé. Après l’adoption de ces amendements par le Sénat, le texte devra faire l’objet d’un examen en commission mixte paritaire (CMP), réunissant députés et sénateurs pour parvenir à une version commune. Cependant, le gouvernement Barnier pourrait avoir recours à l'article 49.3 de la Constitution , permettant l’adoption du texte sans vote, mais ouvrant la voie à une éventuelle motion de censure. (

Le calendrier parlementaire offre trois opportunités pour l’utilisation du 49.3, chacune représentant un risque politique majeur pour le gouvernement. La première pourrait survenir dès ce lundi 2 décembre, ( lors de l’examen des conclusions de la CMP sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Si Michel Barnier déclenche le 49.3, les députés auront la possibilité de déposer une motion de censure, qui pourrait être débattue dès le mercredi 4 décembre. (

La deuxième possibilité se profile le vendredi 6 décembre, ( lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2024. Ce texte, axé sur des mesures de freinage budgétaire, pourrait également donner lieu à un recours au 49.3 et à une nouvelle motion de censure.

Enfin, le dernier risque pour le gouvernement interviendra à l’occasion du retour du projet de loi de finances 2025 à l’Assemblée nationale, prévu pour la semaine du 16 décembre. ( Si l’exécutif opte une nouvelle fois pour le 49.3, une ultime motion de censure pourrait être débattue les 20 ou 21 décembre (. À chaque étape, le gouvernement devra naviguer avec prudence pour éviter une crise politique, d’autant que le contexte tendu autour de la fiscalité immobilière et des aides au logement alimente les tensions entre les différents groupes parlementaires.

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