Pénurie de logements à Toulouse : Les locations touristiques pointées du doigt
6 000 logements toulousains sont des locations touristiques, principalement estampillées Airbnb. Impactés par la crise immobilière mais également par la multiplication des meublés de tourisme, l’offre locative de longue durée pour les habitants se réduit drastiquement, faisant de la recherche de logement une véritable quête du Graal pour de nombreux Toulousains.
Une situation préoccupante partiellement réglementée en 2023, qui impacte cette année encore principalement les étudiants et les familles modestes. Focus...
Des locations saisonnières encadrées depuis novembre 2023
Le nombre croissant de logements proposés à la location saisonnière à Toulouse, à travers des plateformes comme Airbnb, Booking ou Abritel, dépasserait les 6 000, et ce chiffre continue d’augmenter. Ces logements, autrefois disponibles pour des locations classiques, disparaissent du marché, aggravant la pénurie de logements pour des étudiants, des travailleurs ou des familles en quête d'un foyer.
Face à ce phénomène à croissance exponentielle, la ville de Toulouse a instauré une réglementation pour limiter l'impact des locations touristiques. Voici une liste simplifiée des nouvelles règles de la location de meublé de tourisme depuis Novembre 2023 :
- Autorisation préalable nécessaire : Tout changement d’usage d’un local d’habitation (par exemple, pour une location touristique) nécessite une autorisation du maire de Toulouse.
- Déclaration obligatoire : Les propriétaires louant des meublés touristiques doivent enregistrer leur bien auprès de la mairie pour obtenir un numéro d’enregistrement. Ce numéro doit figurer sur toutes les annonces (en ligne ou autres).
- Limitation des locations de courte durée : La location d’un meublé touristique est limitée à 120 jours par an si le bien constitue la résidence principale du propriétaire. Au-delà, une demande de changement d’usage doit être faite.
- Compensation obligatoire : Si un local est transformé pour des locations touristiques, le propriétaire doit transformer un autre local (non destiné à l’habitation) en logement. Cette compensation doit être de qualité et surface équivalentes.
- Autorisation personnelle ou réelle : Les autorisations peuvent être personnelles (temporaire et liée à la personne) ou réelles (définitive et liée au local). Les autorisations personnelles cessent lorsque l’activité prend fin. Les autorisations réelles sont permanentes et attachées au bien.
- Respect des normes : Les biens utilisés comme logements touristiques doivent respecter les normes de décence, hygiène, sécurité incendie et accessibilité.
- Sanctions : Les infractions aux règles peuvent entraîner des amendes allant jusqu’à 50 000 € par bien, ainsi que des poursuites devant le tribunal.
- Obligations pour les locaux commerciaux : Les locaux commerciaux utilisés comme meublés de tourisme doivent également respecter certaines conditions, notamment en ce qui concerne l’équilibre entre habitat, emploi et commerces dans les quartiers concernés.
- Pénalités en cas de non-respect : Des amendes allant jusqu’à 25 000 € peuvent être appliquées en cas de non-respect des obligations, ainsi que des sanctions civiles et pénales, telles que la restitution du local à l’habitation ou l’expulsion des occupants.
Depuis novembre 2023, le dispositif de compensation visant à limiter l'accumulation de biens par des entreprises souhaitant les consacrer exclusivement à la location touristique impose donc aux propriétaires de louer un bien sur le marché locatif classique pour chaque bien mis en location de courte durée.
"Ce dispositif fonctionne bien," confirme Jean-Claude Dardelet, vice-président de Toulouse Métropole en charge de l'attractivité et du tourisme, au journal La Dépêche en précisant que la ville n'a pas attendu 2023 pour agir.
Dès 2016-2017 la déclaration obligatoire des biens à la mairie avait déjà réduit le nombre de logements de courte durée de 9 000 à 7 000. Lorsque en 2022-2023, Toulouse a limité à deux le nombre de biens que chaque propriétaire peut louer en plus de sa résidence principale, le nombre d’annonces est tombé à 5 200.
Une pression immobilière pourtant moins intense qu'ailleurs
Dans des villes comme Marseille, Nice ou Biarritz, le marché immobilier est saturé par les annonces de locations touristiques.
Toulouse, bien qu'étant une destination touristique, ne fonde pas son économie sur ce secteur. Nous avons des locations de courte durée sur plusieurs plateformes comme Airbnb, Abritel, Booking ou Leboncoin, mais la pression immobilière reste moindre par rapport à ces villes
, précise l’adjoint de Jean-Luc Moudenc. Toutefois, la métropole reste attentive aux évolutions réglementaires adoptées ailleurs pour éviter toute dérive.
Nous ne souhaitons pas que la location de courte durée devienne une activité professionnelle à part entière
, explique le en réaffirmant l’engagement de Toulouse Métropole à protéger l’accès au logement pour ses résidents tout en régulant le marché des meublés de tourisme.
Malgré ces efforts, certaines entreprises continuent de contourner les règles en possédant plus de 10 biens destinés à la location touristique. Le responsable du tourisme toulousain confirme que la ville va renforcer ses contrôles à partir de février 2024 ; écrire aux notaires et aux syndics pour leur rappeler qu'ils doivent se conformer à la réglementation en vigueur. Actuellement, sur les 5 200 annonces de locations touristiques, environ une quinzaine de personnes morales sont concernées par ce non-respect des règles.
3000 toulousains en quête d’un logement
Dans la métropole toulousaine, environ 3 000 personnes se retrouvent sans abri ou en recherche active d’un logement. Ce chiffre ne prend même pas en compte celles qui, faute de solution pérenne, trouvent temporairement refuge chez des amis, souvent sur des canapés, souligne Erwan du DAL 31. Une situation exacerbée par la raréfaction des petites surfaces locatives, telles que les studio ou T1, particulièrement touchés par l’essor des locations touristiques.
5 candidats par logement étudiant
Le CROUS de Toulouse, qui gère plus de 11 000 places pour les étudiants, rapporte qu'il y a près de cinq demandes pour chaque logement disponible. Elisa, membre de la CGT-SELA, témoigne au micro de France 3 : « De nombreux étudiants viennent nous voir parce qu'ils n'ont aucune solution de logement. Certains se retrouvent à vivre très loin de leur université, ou sont contraints de dormir chez des amis pendant des mois ». Elisa ajoute que des cas d'étudiants se retrouvant dans des squats ou dormant à l'extérieur ont déjà été signalés.
La hausse des loyers : + 300€ en 5 ans pour les T1
D’après les organisations comme le DAL 31 et la CGT, cette situation contribue à maintenir les loyers à un niveau élevé. Le prix des studios et des T1, par exemple, a augmenté de près de 300 euros entre 2015 et 2020. Ces associations demandent un encadrement strict des loyers et un gel des hausses pour les loyers à Toulouse.
Un manque de locations longue durée multifactoriel
Selon l'observatoire des transactions et locations de Guy Hoquet "Durant le premier semestre 2024, le marché immobilier a connu un ralentissement en Occitanie. Bien que le nombre de biens mis en vente ait augmenté de 9,2 % sur un an, la demande n'a pas suivi. Raison principale ? Les difficultés d'accès au financement pour les acheteurs potentiels.
Une crise amplifiée par la baisse des transactions et le recul des nouveaux projets immobiliers, ainsi que par un taux de rotation historiquement faible, y compris dans le logement social. Sébastien Benêt président de la FNAIM qui répond au journal La Dépêche, affirme : Il y a un tel manque de confiance que les personnes préfèrent rester là où elles sont même si ce n’est pas idéal
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À Toulouse, où environ 55 % des habitants sont locataires, l'offre de biens à louer a fortement diminué, avec une baisse de 6,6 % entre janvier et juin 2023, selon l'observatoire de Guy Hoquet.
La Ville Rose accueille environ 10 000 nouveaux résidents chaque année. Ce flux constant de nouveaux arrivants contribue à la pression déjà élevée sur le marché locatif. Avec l'arrivée des nouveaux étudiants, la situation s'annonce encore plus compliquée. Le dernier baromètre de la Fnaim 31 révèle une hausse de 4,5 % des loyers sur un an, atteignant 12,40 euros/m² à la fin de 2023.
Il semblerait pourtant que la problématique prioritaire soit davantage la disponibilité des logements plutôt que dans leur coût.