Quand une maison est-elle légalement considérée comme neuve ?

Quand est-ce qu'une maison est considérée comme neuve ?

Rennes - Promotion immobilière - Sophie Castella le 31/07/2025

Une maison peut avoir l'air neuve sans l'être juridiquement. En droit fiscal français, le statut « neuf » obéit à des règles strictes du Code général des impôts qui déterminent des enjeux financiers majeurs : TVA immobilière, frais de notaire réduits, garanties légales étendues. Quand exactement une maison est-elle considérée comme neuve ? Comment ce statut se perd-il et peut-il être retrouvé ? Ce guide décrypte les critères précis qui régissent cette frontière déterminante entre neuf et ancien.

Définition légale du neuf : 2 conditions indissociables

En droit fiscal français, une maison est dite « neuve » lorsqu’elle remplit simultanément deux critères, clairement posés par l’ article 257, I-2° 2 du Code général des impôts (CGI) :

L’achèvement correspond au moment où le logement est habitable (eau, électricité, fermeture, salubrité). Tant que cinq années civiles complètes ne se sont pas écoulées, le bien reste considéré comme neuf.

Le Bulletin officiel des finances publiques précise qu’un logement neuf « n’a jamais été habité ni utilisé, même temporairement ». La simple prise de possession, y compris un usage professionnel ou locatif d’une nuit, suffit à lui faire rejoindre le parc "ancien" et changer de statut fiscal.

Achèvement : la date qui déclenche le compte à rebours

L’administration retient la date de la déclaration attestant l’achèvement et la conformité des travaux (DAACT) ou, en CCMI, celle du procès-verbal de réception. C’est ce repère qui fait démarrer le délai de cinq ans et non la signature de l’acte notarié ou l’emménagement.

Exemple

Une maison réceptionnée le 15 mars 2021 restera officiellement « neuve » jusqu’au 14 mars 2026, à condition qu’aucun occupant (propriétaire, locataire, entreprise) n’y ait résidé entre-temps. Si elle est habitée ne serait-ce qu’un week-end en 2023, elle bascule immédiatement dans la catégorie des biens anciens.

Pourquoi ces règles sont-elles si strictes ?

Elles servent de socle à la TVA immobilière : seule une maison neuve vendue dans ce délai sans occupation est soumise à la TVA (20 % ou taux réduit sous conditions). La même cession, réalisée après cinq ans ou après première occupation, sort du champ de la TVA et relève des droits de mutation « classiques » de 5,80 %. Une frontière temporelle et d’usage qui change autant pour l’acheteur que pour le vendeur.

Statut neuf : un déclencheur différent selon chaque contrat

S’il existe une définition fiscale unique du « neuf », son point de départ concret varie selon le mode de construction ou d’achat ; trois grands cas se présentent.

Livraison VEFA : le jour où le bien devient fiscalement neuf

Dans une vente en l’état futur d’achèvement (VEFA), l’acquéreur signe l’acte avant que la maison ne soit terminée. D’après l’article L. 261-1 du Code de la construction et de l’habitation (CCH), la livraison s’effectue à la remise des clés ; c’est cette date qui lance le compte à rebours des cinq années. Tant que l’acheteur n’a pas pris possession du bien, celui-ci n’est pas « achevé » au sens fiscal.

Le CCMI : réception des travaux

Pour une maison édifiée sous contrat de construction de maison individuelle (CCMI), la référence est le procès-verbal de réception signé avec le constructeur (CCH, art. L. 231-1). Dès ce PV, le bien est réputé achevé et devient donc neuf.

Marché de travaux ou auto-construction

Lorsque le maître d’ouvrage gère lui-même les entreprises ou construit en partie seul, on parle de marché de travaux ou de livraison à soi-même (LASM). Là encore, c’est la réception (acte unilatéral daté et signé) qui fixe le démarrage du statut neuf. En cas de revente avant les cinq années réglementaires, le propriétaire doit même, en principe, s’auto-facturer la TVA sur la part de bâtiment réalisée.

Couple regardant une maison sur tablette
©Andrey-Popov -Shutterstock

Réhabilitation lourde, quand l’ancien redevient neuf

Une maison peut redevenir fiscalement « neuve » sans être fraîchement bâtie. L’article 257 I-2°, 2 du CGI prévoit en effet qu’un immeuble qui n'a légalement plus le statut de "neuf" le récupère lorsque des travaux lourds équivalant à une reconstruction sont réalisés. L’administration a précisé le périmètre de ces opérations dans le BOFiP-TVA-IMM-10-10-10-10 : quatre catégories de travaux, alternatives, suffisent à basculer dans le neuf:

  1. Surélévation ou addition d’un niveau entraînant la création de planchers neufs ;
  2. Remise à neuf de la majorité des fondations ;
  3. Remise à neuf de la majorité des éléments hors fondations assurant résistance et rigidité (murs porteurs, poutres, planchers porteurs) ;
  4. Remise à neuf de la majorité des éléments de second œuvre (menuiseries extérieures, installations électriques, chauffage, plomberie, cloisonnement interne).
  5. « Lorsque l’une de ces conditions est remplie, le bien est assimilé à un immeuble neuf et sa cession entre dans le champ de la TVA immobilière, même si l’immeuble a plus de cinq ans. »

    BOFiP-TVA-IMM-10-10-10-10, §80

    Seuil financier : le test des deux tiers

    La doctrine fiscale ajoute un garde-fou : les dépenses de rénovation doivent représenter au moins les ⅔ du coût de reconstruction à neuf pour que l’assimilation soit acquise (BOFiP même référence, §90). En dessous, le logement reste « ancien », soumis aux droits de mutation à 5,80 %.

    Effets pratiques

    • TVA : revente assujettie à 20 % (ou 5,5 % dans certains périmètres).
    • Frais de notaire réduits : environ 2 à 3 % du prix d'achat.
    • Garanties légales : la « nouvelle livraison » ouvre une garantie décennale sur les travaux reconstruits (art. 1792 C. civ.).
    • Surélévations et lots indépendants

      La création d’un étage entier ou d’une aile neuve, même sans toucher au reste de la bâtisse, engendre un lot fiscal neuf distinct ; la partie non transformée demeure ancienne. On peut donc vendre un ensemble mixte : TVA sur la partie neuve, droits de mutation sur l’ancien (BOFiP-ENR-DMTOI-10-40, § 270 s).

      Conséquences fiscales et financières

      Derrière un simple mot se cachent des écarts de taxation spectaculaires, car la qualification « maison neuve » déclenche ou supprime tout un éventail d’avantages financiers. Mieux vaut donc savoir, dès la signature, de quel côté de la ligne on se trouve et comment ce choix impactera votre portefeuille le jour de la revente.

      TVA immobilière : 20 % (ou 5,5 %/10 % sous conditions)

      La vente d’une maison neuve est soumise à la TVA immobilière (taux normal 20 %). Dans certains périmètres de rénovation urbaine (ANRU, QPV), ce taux descend à 5,5 % ; pour le logement intermédiaire, il peut être ramené à 10 % (CGI, art. 278 sexies).

      Frais de notaire réduits

      Parce que la mutation d’un immeuble neuf déjà soumis à la TVA bénéficie d’une taxe de publicité foncière fixée à 0,70 % (CGI, art. 1594 F quinquies A) les frais d’acquisition (émoluments + débours + droits) oscillent entre 2 % et 3 % du prix, contre 7 % à 8 % dans l’ancien.

      Droits de mutation après bascule en « ancien »

      Dès qu’une première occupation intervient ou à l’expiration du délai de cinq ans, la revente n’est plus assujettie à la TVA ; elle supporte alors les droits de mutation mentionnés plus haut (taux département + commune) – sauf option pour la TVA sur marge dans certains cas de lots bâtis.

      Exonération temporaire de taxe foncière

      Les constructions neuves peuvent bénéficier d’une exonération partielle ou totale de taxe foncière pendant deux ans (CGI, art. 1383). Certaines communes prolongent de trois ans supplémentaires pour les logements à haute performance énergétique (CGI, art. 1383-0 B bis). La demande doit être déposée dans les 90 jours suivant l’achèvement (CGI, art. 1406).

      Impact sur la plus-value

      Pour un particulier, la TVA payée à l’achat n’est jamais récupérable, sauf si vente sous régime TVA et statut assujetti. En revanche, dès que le bien passe dans la catégorie ancien, la plus-value entre dans le régime classique (impôt sur le revenu + prélèvements sociaux), avec des abattements qui ne commencent à s’appliquer qu’à partir de la sixième année de détention.

      Les garanties légales qui sécurisent votre maison neuve

      Une maison achevée dans le cadre d’un contrat de construction ou d’une VEFA bénéficie automatiquement de trois garanties prévues par le Code civil. Elles prennent effet à compter de la réception des travaux, indépendamment du statut fiscal "neuf" ou "ancien".

      La garantie de parfait achèvement (1 an)

      Instituée à l’article 1792-6 du Code civil, elle oblige le constructeur à réparer tous les désordres, qu’ils soient esthétiques ou fonctionnels, signalés soit dans le procès-verbal de réception, soit par courrier recommandé dans l’année qui suit. Un joint mal posé, une porte qui frotte : tout doit être repris, sans frais pour le propriétaire.

      La garantie biennale de bon fonctionnement (2 ans)

      Deuxième étage de protection, l’article 1792-3 couvre pendant deux ans les éléments d’équipement dissociables du gros œuvre : volets roulants, chaudière, interphone, radiateurs, robinets… S’ils tombent en panne ou ne fonctionnent pas correctement, le constructeur doit les réparer ou les remplacer. Un simple courrier recommandé suffit pour activer cette garantie.

      La garantie décennale (10 ans)

      Enfin, l’article 1792 et suivants imposent au constructeur une responsabilité de dix ans sur tout dommage compromettant la solidité de l’ouvrage ou le rendant impropre à sa destination : fissures structurelles, infiltration majeure, affaissement de plancher, défaut d’étanchéité de la toiture, etc.

      L’assurance dommages-ouvrage, catalyseur des réparations

      Pour financer sans délai les travaux relevant de la décennale, le maître d’ouvrage doit souscrire, avant chantier, une assurance dommages-ouvrage (Code des assurances, art. L. 242-1). Si un sinistre majeur survient, l’assureur indemnise en principe sous 105 jours, puis se retourne contre les entreprises responsables. Cette couverture (obligatoire) évite d’attendre un jugement pour engager les réparations.

      Comment prouver qu'une maison est toujours "neuve" ?

      Avant de revendre ou de solliciter une aide, il faut être en mesure de démontrer que la maison relève encore du statut « neuf ». Voici les preuves indispensables à récolter pour éviter tout redressement fiscal ou litige notarial.

      • La déclaration attestant l’achèvement et la conformité des travaux (DAACT),
      • Le procès-verbal de réception signé entre le maître d’ouvrage et l’entreprise (conserver l’original contresigné est indispensable pour dater le statut neuf,
      • Prouver l'absence d'occupation avec les factures d’énergie à zéro, une attestation sur l’honneur de non-occupation, l'absence de bail enregistré ou de changement d’adresse.

      Ces éléments complètent le dossier lors d’une revente ou d’une demande d’exonération de taxe foncière.

      Le rôle du notaire

      Au moment de la cession, le notaire vérifie ces pièces ; s’il constate que la maison remplit encore les deux conditions, il applique le régime TVA/frais réduits.

      En cas de contrôle fiscal

      L’administration peut remonter cinq ans en arrière pour réclamer la TVA éludée si elle prouve qu’un bien présenté comme neuf a en réalité été occupé. D’où l’importance de sécuriser son dossier documentaire dès la réception des travaux.

      F.A.Q

      Une maison construite il y a plus de cinq ans mais jamais habitée reste-t-elle neuve ?

      Non. Le Code général des impôts (art. 257 I-2° 2) impose deux conditions cumulatives : moins de cinq ans et aucune occupation. Dépasser l’un ou l’autre critère fait automatiquement basculer le bien dans l’ancien.

      Qu’appelle-t-on « réhabilitation lourde » assimilée à du neuf ?

      Lorsque les travaux remettent à neuf la majorité du gros œuvre ou du second œuvre, ou surélèvent la maison, et que le coût dépasse les deux tiers de la valeur du bâti, le bien redevient fiscalement neuf (BOFiP-TVA-IMM-10-10-10-10).

      Qui est responsable des défauts en VEFA ?

      Toujours le promoteur. Conformément aux articles L. 261-1 et suivants du CCH, il est votre interlocuteur unique pour les garanties de parfait achèvement, biennale et décennale, même s’il se retourne ensuite contre les entreprises.

      Quels frais paie l’acheteur si le bien est encore neuf ?

      TVA immobilière incluse dans le prix et frais de notaire réduits (environ 2-3 %). Dans l’ancien, les droits de mutation montent à 5,80 % et les frais totaux à 7-8 %.

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