Parc de Loire : dix hectares de fraîcheur pour l’île de Nantes

Le parc de Loire : nouveau poumon vert de l'île de Nantes

Nantes - Environnement - Sophie Castella le 16/07/2025

À l'ouest de l' île de Nantes, les grues laisseront bientôt place à la fougère. D'ici 2030, un parc de dix hectares prendra place en bord de Loire pour dissiper l'un des plus vastes îlots de chaleur de la métropole.

Ce nouveau poumon vert s’inscrit dans une ambition plus large : remettre 21 hectares de pleine terre au cœur du territoire insulaire et tisser, de parc en jardin, une véritable “chaîne de fraîcheur” à l’échelle de la ville. Conçu en concertation avec habitants, paysagistes et climatologues, le projet promet de réconcilier l’ancienne friche portuaire avec le rythme vivant de la Loire. Voici comment cette vision va prendre racine, étape par étape.

Un projet piloté en concertation

En décembre 2024, Nantes Métropole tourne une page : elle confie le pilotage du sud-ouest de l’île à l’agence de paysage D’Ici Là et à l’urbaniste Sylvanie Grée pour un mandat de huit ans, 2025-2032. Leur feuille de route tient en une promesse simple, formulée par la maire Johanna Rolland : transformer l’un des plus grands îlots de chaleur de la métropole en îlot de fraîcheur .

Plutôt que de dessiner dans un bureau, la nouvelle équipe s’offre un contre-pied radical : lancer la concertation avant la première esquisse. Dès mars 2025, une « Assemblée de l’île » rassemblant 36 habitants, usagers et acteurs économiques se met à phosphorer sur les ambitions du futur parc. Nous avons demandé aux citoyens de fixer le cap avant que le crayon ne touche la planche , souligne Sylvanie Grée, convaincue que la ville se fabrique désormais de l’intérieur.

Pour rendre cette co-construction tangible, deux laboratoires de plein air voient le jour : le Jardin des possibles, ouvert en juillet 2025, et La Perm’, atelier-forum installé rue Maya-Angelou. On y teste des revêtements 100 % réemployés, on reconstitue des sols fertiles, on plante des bosquets “climato-compatibles”, autant de prototypes qui nourriront le chantier définitif. L’Assemblée suit le calendrier des saisons : après la nature en 2025, les mobilités seront décortiquées en 2025-2026, puis le logement durable en 2026.

Ce dispositif inédit marie ainsi gouvernance publique, expertise professionnelle et intelligence citoyenne ; il préfigure une nouvelle façon de tracer la ville : le parc d’abord, les bâtiments ensuite. Les 10 hectares de verdure attendus en 2030 naîtront donc d’une partition écrite à plusieurs mains, où chaque habitant joue sa note sans fausse modulation.

Les contours géants du futur parc

Vue sur le futur parc de Loire sur l'île de Nantes
© Agence TER / Nantes Métropole

Dix hectares : c’est la surface de pleine terre que la Samoa compte livrer d’un seul tenant au sud-ouest de l’île, soit l’équivalent mis bout à bout du Jardin des Plantes et du Jardin extraordinaire, un véritable carré de chlorophylle posé au bord du fleuve.

Cette clairière urbaine s’imbrique dans un ruban vert de 16 hectares qui englobe les berges du quai Wilson, la rue Saint-Domingue et le Jardin du Rail, dessinant la première maille de la « chaîne des parcs de Loire » voulue par la Métropole.

Le tracé général forme une diagonale partant du boulevard Simone-Veil, filant tout droit vers la pointe ouest et ouvrant des panoramas inédits sur l’estuaire. Les futures lignes de tram 6 et 7 longeront cette grande allée, transformant le parc en gare verte autant qu’en belvédère sur les marées. Sur le bord du sentier, le vieux quai sera « découvert » : la Loire passera littéralement sous l’ouvrage pour irriguer des prairies humides, tandis qu’une terrasse suspendue permettra aux promeneurs de goûter l’air salin sans quitter la ville.

Un paysage cousu par la Loire

Oubliez le jardin ponctuel : le futur parc se pense comme une mue paysagère, capable de faire respirer tout l’ouest de l’île. Premier geste : raser symboliquement l’ancienne digue minérale du quai Wilson pour « laisser entrer le fleuve » ; l’eau inondera des prairies humides, nourrira des roselières et dessinera, au pied d’une terrasse panoramique, un nouveau rivage où l’on pourra presque « tremper ses baskets » dans la Loire.

Autour de ce ruban mouvant, les paysagistes de l’agence D’Ici Là déploient un dispositif composé de lisières denses pour amortir le vent du sud, clairières ouvertes pour capter la lumière du nord et un cordon de pleine terre continu servant de gouttière naturelle en cas de crue. L’ambition climatique est assumée : la Métropole veut appliquer la règle « 3/30/300 » (trois arbres visibles depuis chaque logement, 30 % de canopée, un espace vert à moins de 300 m).

Le parc, moteur d'un nouveau quartier métropolitain

Sur la frange sud, entre le quai Wilson et le boulevard Simone-Veil, la Métropole projette 1 500 à 2 100 logements neufs, dont 55 % à loyers sociaux ou maîtrisés, ainsi que 25 000 m² d’équipements publics — crèche, groupe scolaire, salles de sport et lieu culturel de quartier. L’idée est claire : donner d’emblée aux nouveaux habitants un « jardin de poche XXL », puis y greffer les services du quotidien plutôt que l’inverse.

Le calendrier épouse la grande diagonale du parc : à l’est, le nouvel hôpital universitaire ouvrira ses portes en 2028 ; juste en contrebas, le quai Wilson sera désimperméabilisé à 70 % et replanté de 250 arbres. Les urbanistes misent sur cet enchaînement “hôpital-quai-parc” pour créer un véritable corridor de bien-être : jardins de rééducation pour les soignants, aires de jeux inclusives pour les familles, salons boisés pour les promeneurs du soir.

Le modèle économique suit la même logique circulaire. Les contre-allées du parc accueilleront un rez-de-chaussée actif avec des cafés, ateliers associatifs et petite restauration locale destiné à faire vivre les lieux dès l’aube jusqu’à la tombée du jour. Selon la Samoa, maître d’ouvrage, cette programmation de proximité vise à équilibrer l’activité commerciale à l’échelle de l’île, sans vampiriser les rues plus anciennes . Là encore, la nature sert de matrice : les pas-perdus commerciaux seront construits en bois bas-carbone, les toitures végétalisées récupèreront l’eau de pluie pour arroser les prairies humides du parc.

Plan Pleine Terre : le parc comme tête de pont

Le futur parc de Loire se place dans une vaste toile verte que la métropole a baptisé "plan Pleine Terre". D’ici à 2030, ce programme prévoit de débitumer 10,8 hectares, de rendre à la nature 21 hectares supplémentaires de sols vivants et d’y planter plus de 1 300 arbres – l’équivalent d’une micro-forêt de vingt pâtés de maisons.

À l’est, la nouvelle chaîne commence avec les Jardins de l’Estuaire : un ruban de 8 hectares et 1,6 kilomètre de long qui ondule entre le quartier République et le quai des Antilles. Cette promenade bocagère, en chantier depuis 2024, livrera progressivement ses prairies, sa noue plantée et ses 800 arbres jusqu’en 2027.

Un peu plus loin, l’ancienne friche ferroviaire deviendra le Jardin du Rail, 3 hectares de clairières sportives et de talus fleuris, attendus pour début 2026. Les deux jardins feront office de « maillons » entre le cœur de ville et le grand parc de Loire : un couloir de fraîcheur en continu, où l’on passera de la prairie à la roselière sans quitter ses baskets.

En rendant la terre à elle-même, les aménageurs espèrent abaisser la température de l’île de 2 à 3 °C lors des pics caniculaires et réduire les ruissellements qui saturent aujourd’hui les réseaux d’eau pluviale. Chaque mètre carré renaturé devient ainsi une « éponge » capable d’absorber l’averse, d’infiltrer la Loire et, surtout, de faire respirer un tissu urbain parmi les plus denses de la métropole.

F.A.Q

Qui pilote le projet ?

Le tandem de paysagistes D’Ici Là – Sylvanie Grée assure la maîtrise d’œuvre (mandat 2025-2032) sous l’égide de Nantes Métropole et de la Samoa, aménageur de l’île.

Comment les habitants participent-ils ?

Une « Assemblée de l’île » de 36 riverains co-élabore le dessin, tandis que les laboratoires de plein air « Jardin des possibles » et « La Perm’ » testent sols, essences et revêtements avant validation définitive.

Que deviendra l’ancien quai Wilson ?

Il sera désimperméabilisé à 70 %, rabaissé pour laisser la Loire irriguer des prairies humides et replanté d’environ 250 arbres, créant une promenade fraîche le long du fleuve.

Quels transports pour s’y rendre ?

Les futures lignes de tram 6 et 7 longeront la diagonale centrale ; les pistes cyclables mailleront toute la lisière verte.

Quand ouvriront les premiers aménagements ?

La livraison des cheminements et des premières plantations est attendue fin 2029 ; l’inauguration complète est fixée à l’horizon 2030.

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