Crédit immobilier : Une possible extension du PTZ sur tout le territoire ?
L'accès à la propriété est une des problématiques principales de la plupart des ménages en France, particulièrement dans un contexte où les taux d’intérêt augmentent et où la crise du logement persiste. Le Prêt à Taux Zéro (PTZ), une aide essentielle pour les primo-accédants, permet de financer sans intérêt une partie de l’achat immobilier. Cependant au fur et à mesure des années, des ajustements ont été appliqués au dispositif et ont réduit son accessibilité, notamment en le limitant aux zones dites « tendues » et en excluant les maisons individuelles.
Le 1er octobre dernier, le Premier Ministre Michel Barnier a annoncé son intention d’étendre à nouveau le PTZ à tout le territoire. Cette décision, fortement attendue par le secteur de la construction et par les ménages modestes, a été prise dans le but de relancer l’accession à la propriété.
Le PTZ, une mesure phare pour l’accession
Le Prêt à Taux Zéro a été mis en place en 1995 dans le but de faciliter l’accès à la propriété pour les primo-accédants, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux dernières années. Ce dispositif permet donc de financer une partie de l’achat d’un logement sans intérêts d’emprunt, ces derniers étant pris en charge par l’État. Historiquement, le PTZ a toujours été réservé aux ménages dont les revenus ne dépassent pas certains plafonds, adaptés selon la zone géographique et la composition familiale.
Au fil des ans, le PTZ a connu plusieurs évolutions. Initialement conçu pour être accessible sur tout le territoire, il a été recentré à plusieurs reprises pour s’adapter aux réalités du marché immobilier. En 2020, un important remaniement a limité son accès aux zones dites « tendues », c’est-à-dire là où la demande de logements est beaucoup plus forte que l’offre, notamment dans les grandes villes et leurs banlieues proches.
Une réforme de taille déjà promulguée en 2024
Dans sa réforme entrée en vigueur le 1er avril 2024, le dispositif a été à nouveau recentré et ne couvre désormais plus les maisons individuelles, se concentrant uniquement sur l'achat d’appartements neufs en zones tendues, ou de logements anciens en zones « détendues », à condition qu'ils nécessitent des travaux de rénovation énergétique représentant au moins 25 % du coût d’acquisition.
En revanche, les plafonds d’accès au PTZ ont été augmentés pour pouvoir permettre à un plus grand nombre de ménages l’accès au dispositif. À noter également que plus de 800 communes sont devenues éligibles au PTZ cet été avec une mise à jour du zonage du dispositif.
Malgré les quelques restrictions, le PTZ a toujours été un levier puissant pour permettre aux ménages modestes d’accéder à la propriété. En 2023, plus de 47 000 prêts à taux zéro ont été accordés, mais ce chiffre reste bien en deçà des attentes. Selon les estimations du gouvernement, environ 24 millions de ménages pourraient potentiellement bénéficier du dispositif, si ses critères d’éligibilité étaient moins restrictifs.
L’importance du PTZ réside non seulement dans l’aide directe qu’il offre aux acheteurs, mais aussi dans son rôle de stimulant pour le secteur de la construction, particulièrement en période de crise.
Michel Barnier mise entre autres sur le PTZ pour sauver le Logement
Lors de son discours de politique générale prononcé le 1er octobre à l’Assemblée nationale, Michel Barnier a fait une annonce remarquée en déclarant que le gouvernement soutiendrait une extension du PTZ à l’ensemble du territoire. Cette décision intervient dans un contexte où le marché immobilier connaît des difficultés, après une longue période de hausse des taux et des prix des biens. Le pays traverse une crise de l’offre qui freine l’accession à la propriété pour de nombreux ménages.
Cela faisait de longs mois que les fédérations de promoteurs, constructeurs et autres acteurs du secteur tiraient la sonnette d’alarme sur l’état du logement en France. Michel Barnier a donc abordé ce sujet sur plusieurs points comme bien entendu le PTZ, mais aussi l’assouplissement du DPE, les ajustements de la réglementation “Zéro Artificialisation Nette” (ZAN) ou encore les attributions de logements sociaux.
En rendant le PTZ à nouveau accessible au niveau national, Barnier affirme vouloir soutenir les primo-accédants, quels que soient leur localisation et leur type de projet immobilier.
Actuellement, le PTZ est réservé aux zones tendues (A, Abis, B1), où la demande de logements est bien supérieure à l’offre. Dans ces zones, seuls les appartements neufs peuvent être financés par ce dispositif. En revanche, dans les zones « détendues », le PTZ ne concerne que les logements anciens, à condition que l’acheteur s’engage à réaliser des travaux de rénovation énergétique. Avec cette extension, Michel Barnier propose de lever ces contraintes, permettant ainsi aux primo-accédants de bénéficier du PTZ indépendamment de la localisation de leur projet.
Outre cette ouverture géographique, le gouvernement a déjà également relevé les plafonds de revenus pour élargir l’éligibilité du PTZ à davantage de foyers. Ainsi, les ménages aux revenus modérés mais légèrement supérieurs aux plafonds actuels peuvent désormais bénéficier de cette aide. Ce relèvement intervient dans le cadre de l’entrée en vigueur le 1er avril 2024 des modifications votées dans le PLF 2024. Cela a permis à des millions de foyers supplémentaires de devenir éligibles au dispositif.
De plus, le montant maximum de prêt a été augmenté, permettant aux foyers les plus modestes d’emprunter jusqu’à 100 000 euros sans intérêts, contre 80 000 euros précédemment.
Un PTZ étendu soutenu par le secteur immobilier
La Fédération Française du Bâtiment (FFB), qui milite depuis longtemps pour un « PTZ universel », a salué cette initiative, bien qu’elle appelle également à une réintégration des maisons individuelles dans le champ des biens éligibles. En effet, avant leur exclusion du dispositif, les maisons représentaient les deux tiers des PTZ attribués. Réintégrer celles-ci à l’éligibilité du dispositif aurait un impact immédiat et important sur l’étendue des projets soutenus et permettrait une revitalisation de certaines régions où ce type d’habitat est plus fréquent.
L’annonce du Premier Ministre répond donc en partie aux revendications de la FFB et confirme la volonté du gouvernement de relancer l’accession à la propriété, en particulier pour les primo-accédants. Cependant, l’exclusion des maisons individuelles reste un point de discorde, et il n’a pas été évoqué si cette restriction serait reconsidérée dans les mois à venir.
Du côté des professionnels du crédit immobilier, cette extension du PTZ est perçue comme une bouffée d’air frais pour de nombreux emprunteurs. En effet, la hausse rapide des taux d’intérêt ces dernières années a exclu un grand nombre de primo-accédants du marché, qui peinent à accéder à des financements. En offrant un prêt sans intérêts à un plus large public, cette mesure pourrait compenser, au moins en partie, l’impact de cette hausse des taux. Ce PTZ étendu pourrait redonner confiance aux emprunteurs et dynamiser les transactions immobilières dans tout le pays.
Mais sera-t-il finançable ?
Depuis les modifications du PTZ 2024, 29 millions de foyer sont potentiellement éligibles au PTZ, ce qui représente plus de 70% de la population française. Le PTZ a coûté environ 800 millions d’euros à l’État en 2023, pour 47 260 prêts accordés. En toute logique, ce chiffre devrait considérablement gonfler en cas d’élargissement du dispositif à tout le territoire. En outre, il faut également considérer les tranches, les montants alloués, les quotités...
Cette extension, bien qu’elle réponde aux besoins d’accession à la propriété, soulève des questions quant à la soutenabilité de cette aide sur le long terme. L’effort budgétaire nécessaire pour financer l’ensemble des prêts accordés dans ce cadre risque de s’accroître avec le temps, surtout si la demande augmente de manière importante.