Baromètre de l'encadrement des loyers : 32 % des annonces hors des clous

Encadrement des loyers : La situation en 2025

Montpellier - Location - Hervé Koffel le 22/09/2025

Chaque année depuis son intronisation en 2019, l'encadrement des loyers est analysé par la Fondation pour Logement (ex-Fondation Abbé Pierre). Cette analyse se base sur de nombreuses annonces épluchées dans certaines grandes villes où le dispositif a été appliqué.

Le cinquième baromètre de l'encadrement des loyers, publié le 4 septembre 2025 par la Fondation, révèle qu'une part non négligeable des logements sont encore au-dessus de la limite. Ces dépassements de plafonds varient énormément selon les villes affectées. Une fracture territoriale qui intervient à quinze mois de l'expiration du dispositif expérimental en novembre 2026, et devient un enjeu important.

État des lieux national de l'encadrement des loyers en 2025

L'encadrement des loyers connaît une progression géographique continue avec 70 communes concernées en 2025, mais son respect se dégrade : 32 % des annonces analysées dépassent les plafonds légaux, soit une hausse de 4 points par rapport à 2024. Cette moyenne, calculée sur plus de 20 000 annonces recensées entre août 2024 et août 2025, masque des écarts territoriaux considérables que nous verrons plus bas.

Les logements les plus dégradés accumulent les infractions : 38 % des logements classés G du DPE proposent des loyers dépassant les plafonds, alors que les compléments de loyer sont interdits pour les logements F et G depuis 2023, sans exception possible selon la réglementation en vigueur.

L'encadrement s'étend de Paris à Bayonne, couvrant les principales métropoles françaises selon des modalités définies par la loi ELAN de 2018. Chaque collectivité fixe un loyer de référence selon la localisation, le type de logement et l'année de construction, dans une fourchette allant d'un plancher minoré de 30 % à un plafond majoré de 20 %.

Les montants des dépassements varient fortement : 237 euros mensuels en moyenne à Paris contre 139 euros à Montpellier. Cette différence de près de 100 euros représente 1 200 euros d'écart annuel pour les locataires concernés. Sur l'ensemble du territoire, la moyenne nationale de 192 euros mensuels génère un surcoût annuel de 2 304 euros par logement non conforme. Pour un logement "classique" à 650 €/mois, cela représente 3,5 mois de loyers en plus sur un an.

Montpellier : l'élève modèle avec 12% de dépassements seulement

Montpellier tire son épingle du jeu depuis son entrée dans le dispositif le 1er juillet 2022. La métropole héraultaise affiche le meilleur taux de respect national avec seulement 12 % de dépassements selon le baromètre de la Fondation pour le Logement. Une note positive dans cette période tendue pour le logement à Montpellier, avec une offre qui peine à suivre la demande.

Ces 12 %, c'est une performance qui résulte d'un travail de pédagogie mené par Montpellier Métropole auprès des propriétaires et agences immobilières. L'Observatoire local des loyers publie des grilles tarifaires actualisées annuellement par arrêté préfectoral, offrant une base réglementaire claire.

Dans l'écusson historique et le quartier Richter (zone 1), le loyer de référence pour un studio ancien s'établit à 18 €/m², autorisant un plafond majoré à 21,6 €. Pour un studio de 20 m², cela fixe un plafond légal de 432 euros hors charges.

L'impact bénéficie particulièrement aux 120 000 étudiants de l'agglomération. Montpellier Métropole a mis en place un guichet unique centralisant les réclamations via son site internet (montpellier3m.fr), avec un accueil physique à l'Hôtel de la Métropole et un formulaire de signalement en ligne.

Les disparités de dépassements de plafonds

Montpellier occupe donc la première place avec seulement 12 % de dépassements, confirmant une amélioration spectaculaire depuis 2022. À l'opposé, Plaine-Commune (regroupement intercommunal de 8 communes en Seine-Saint-Denis) franchit le seuil critique avec 59 % d'annonces illégales, constituant la première majorité de loyers hors-la-loi mesurée depuis le lancement du baromètre.

Les bons élèves progressent : Lyon-Villeurbanne (24 %) et Bordeaux (25 %) améliorent leurs performances par rapport aux années précédentes.

Paris stagne à 31 % d'annonces hors-plafonds, un taux identique à Lille mais qui masque une réalité financière plus lourde : les dépassements parisiens atteignent 237 euros mensuels contre 122 euros dans la métropole lilloise.

La banlieue parisienne connaît une crise de respect du dispositif. La part de dépassement des plafonds cette année à Plaine-Commune (59%) est un record national. Est-Ensemble affiche également un taux de 38 %. Les nouveaux entrants montrent des résultats mitigés : Grenoble débute à 45 %, le Pays Basque à 38 %.

Territoire Taux de dépassement 2025 Dépassement moyen Tendance
Montpellier 12 % 139 €/mois Nette amélioration
Lyon-Villeurbanne 24 % 161 €/mois Amélioration
Bordeaux 25 % 154 €/mois Amélioration
Paris 31 % 237 €/mois Légère dégradation
Lille 31 % 122 €/mois Amélioration
Est-Ensemble 38 % 199 €/mois Dégradation
Pays Basque 38 % 183 €/mois Premier bilan
Grenoble 45 % 163 €/mois Premier bilan
Plaine-Commune 59 % 203 €/mois Forte dégradation
encadrement des loyers baromètre 2025 - Un homme choqué en découvrant son augmentation de loyer
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Segments les plus touchés par ces loyers illégaux

Le baromètre révèle que certains segments échappent massivement au respect de l'encadrement. Les petits logements subissent les pratiques les plus problématiques : 91 % des logements de 10 m² et moins dépassent les plafonds légaux, contre 24 % au-delà de 75 m². Il n'est pas impossible que cela soit dû en partie aux chambres de bonne surlouées et autres marchands de sommeil, malheureusement encore trop nombreux à passer entre les mailles du filet.

Par nombre de pièces, 39 % des studios affichent des loyers supérieurs aux plafonds, contre 28 % pour les deux-pièces et 30 % pour les trois-pièces et plus. Cette surreprésentation des petites surfaces signifie qu'une application plus efficace profiterait avant tout aux jeunes, étudiants et ménages modestes.

Les locations meublées respectent moins les plafonds : 41 % des meublés dépassent les loyers-plafonds, soit 14 points de plus que les locations vides (27 %), malgré des plafonds pourtant plus élevés pour ce type de locations.

L'analyse par gestionnaire montre que les particuliers respectent moins l'encadrement (39 % de dépassements) que les agences immobilières (29 %). Les plateformes d'annonces affichent des niveaux variables : SeLoger avec 24 % d'annonces dépassant les plafonds, PAP à 48 %.

Impact financier et actions locales

L'étude de l'APUR (Atelier parisien d'urbanisme) citée par la Fondation pour le Logement révèle que les locataires parisiens ont économisé en moyenne près de 1 694 euros entre juillet 2023 et juin 2024 grâce à l'encadrement (apur.org).

Sur le terrain, les initiatives locales portent leurs fruits. À Paris, près de 4 000 signalements ont été enregistrés au premier semestre 2025. Les locataires accompagnés ont récupéré en moyenne 3 300 euros de loyers trop perçus via une procédure gratuite.

La métropole de Lyon affiche des résultats similaires avec la Brigade associative inter-locataires (BAIL). Cette structure permet aux locataires de récupérer en moyenne près de 2 500 euros chacun. Au total, 180 000 euros ont été remboursés en deux ans sur le territoire aux locataires lésés.

2026 : l'urgence de la pérennisation

Le dispositif expérimental doit prendre fin en novembre 2026 si aucune loi n'est votée. Cette échéance fait de 2025 une année charnière pour un mécanisme qui concerne 70 communes et des centaines de milliers de locataires.

La Fondation pour le Logement milite pour la pérennisation et l'extension du dispositif. Ses propositions incluent : faciliter les recours des locataires avec une prise en charge par la puissance publique, étendre le délai de contestation d'un complément de loyer, obliger l'enregistrement des logements locatifs par les propriétaires.

Plusieurs évaluations sont en cours, menées par les députés et des économistes missionnés par Matignon. L'étude APUR estime que l'économie aurait été deux fois plus importante pour les locataires si tous les bailleurs avaient respecté l'encadrement sans complément de loyer. L'étude conclut qu'aucune baisse durable du nombre d'annonces ne semble imputable à l'encadrement sur la période 2019-2024.

Sans intervention législative, les économies mesurées appartiendraient au passé, laissant les 70 communes démunies face à la spéculation locative.

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