Transformation de bureaux en logements : La proposition de loi adoptée par le Sénat
Face à la crise du logement qui touche de nombreuses régions en France, le Sénat a récemment adopté une proposition de loi dans le but de faciliter la transformation des bureaux vacants en logements. Le principe de la démarche est de réutiliser des espaces existants pour répondre aux besoins croissants en habitations.
En effet, au vu du nombre de bureaux vacants, cette loi pourrait représenter une solution efficace et durable. Le texte a été accueilli favorablement par l'actuel ministre délégué chargé du Logement Guillaume Kasbarian et de nombreux autres parlementaires, qui voient en cette mesure un levier essentiel pour adapter des villes aux nouvelles attentes des habitants. Malgré l'imminente refonte du gouvernement et la mise en pause des procédure de ratification de textes, cette loi a de grande chance de voir le jour au cours de la nouvelle législature.
Une proposition de loi en réponse à la crise du logement
Déposée en début d'année 2024 par le député MoDem Romain Daubié, la proposition de loi adoptée par le Sénat a pour principal objectif de faciliter la transformation des bureaux vacants en logements. Ce texte répond à une situation préoccupante : on constate un nombre croissant de locaux professionnels vides, alors que l’on manque de plus en plus de logements neufs et de foncier pour les accueillir.
Il s'agit donc d’une part d'apporter une réponse concrète à la pénurie de logements en utilisant des bâtiments déjà construits, ce qui permet une économie de terrain. D'autre part, la loi veut adapter les villes aux nouveaux besoins et attentes des habitants, confrontés à des difficultés croissantes pour se loger. En transformant les bureaux vacants en habitations, on peut non seulement augmenter l'offre de logements mais aussi revitaliser certains quartiers.
Le texte prévoit également d'élargir cette possibilité de transformation à d'autres types de constructions, tels que les garages et les bâtiments d'enseignement, pour maximiser les opportunités de conversion.
Les mesures phares de la loi pour la transformation de bureaux en logements
La facilitation des procédures administratives
Il est prévu de permettre des dérogations plus rapides aux règles d'urbanisme fixées dans les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU), ce qui permettrait de gagner entre six et douze mois dans le processus de transformation. Cette simplification évite la nécessité de réviser le PLU pour chaque projet, à condition d'obtenir l'accord des élus locaux.
La transformation dans les copropriétés
La loi prévoit également de faciliter les transformations au sein des copropriétés en abaissant la majorité de vote nécessaire pour autoriser ces conversions. Actuellement, une transformation de bureaux en logements dans une copropriété requiert une majorité significative de votes favorables, ce qui peut être un obstacle majeur. En abaissant cette majorité, la loi rendrait théoriquement plus accessibles ces transformations et encouragerait les copropriétaires à envisager de telles reconversions.
Le permis de construire réversible
Une autre innovation importante de cette loi est la création d'un “permis de construire réversible”. Ce dispositif permettrait de changer plus facilement la destination d’un bâtiment, grâce à un rapprochement des normes incendies et acoustiques entre les usages de bureaux et de logements. Cette mesure rendrait la conversion plus flexible et adaptable aux besoins futurs, permettant ainsi de revenir à l’usage initial si nécessaire, sans devoir engager de nouvelles procédures complexes.
Le coup de pouce aux logements abordables pour les étudiants
Les anciens bureaux, souvent bien situés et dotés de bonnes infrastructures, sont particulièrement adaptés à une reconversion en résidences étudiantes. La loi prévoit de simplifier les procédures pour les Centres Régionaux des Œuvres Universitaires et Scolaires (CROUS), permettant ainsi d'augmenter l'offre de logements pour les étudiants de manière rapide et efficace.
Cette mesure semble particulièrement attractive dans certaines grandes villes comme Bordeaux ou encore Montpellier, où se loger quand on est étudiant relève du parcours du combattant.
Trouver un logement en résidence étudiante à BordeauxTransformation de bureaux en logements : ce que l’on peut attendre de cette loi
Le texte pourrait avoir un impact rapide et quantifiable étant donné le nombre de bâtiment tertiaire inoccupés ou à l’abandon sur le territoire. En Île-de-France par exemple, on compte actuellement environ cinq millions de mètres carrés de bureaux inoccupés, un chiffre qui pourrait encore augmenter. La transformation de ces espaces pourrait potentiellement aboutir à la création de 70 000 logements. Cela représente une opportunité massive pour réduire la pénurie de logements tout en évitant la consommation excessive de nouvelles terres.
Comme mentionné juste au-dessus, les anciens bureaux se prêtent bien à une reconversion en résidences étudiantes. Accroître rapidement l'offre de logements étudiants est donc une des conséquences attendues, pour répondre à une demande croissante et souvent insatisfaite.
Un plus pour l’environnement et la ville
L'initiative de la transformation de bureaux en logements s'inscrit également dans une démarche de développement durable. En réutilisant des bâtiments existants, cette loi favorise la sobriété foncière, limitant ainsi l’artificialisation des sols et donc l'empreinte écologique liée à la construction de nouveaux bâtiments.
De plus, elle contribue à la revitalisation des quartiers urbains en transformant des espaces sous-utilisés en zones de vie active et habitée, créant ainsi des dynamiques positives pour l’ensemble de la ville.
Des incitations fiscales pour encourager les opérations
La proposition de loi comprend également des mesures fiscales pour rendre les transformations plus attractives. Par exemple, le Sénat a introduit des modifications permettant l'assujettissement automatique de ces opérations à la taxe d'aménagement (destinée à la commune et au département), avec des exonérations possibles décidées par les maires et un abattement de 50 % sur l’assiette de cette taxe.
Enfin, la loi prévoit d’étendre le Projet Urbain Partenarial (PUP) à ce type d’opération de transformation de locaux d’activité en logements. Ce dispositif étant, à la base, prévu pour ouvrir le financement d’équipements publics à des personnes privées, serait alors adapté pour aider au financement des projets de transformation.
Soutien gouvernemental et ministériel
La proposition de loi déposée le 15 décembre 2023 a reçu un soutien appuyé de la part du gouvernement, notamment de Guillaume Kasbarian, ministre délégué chargé du Logement. Dans ses déclarations, il a souligné que face à la "croissance structurelle de la vacance de bureaux dans certaines zones", ce texte représente un outil essentiel pour accélérer la conversion de bâtiments en logements.
Il a également mis en avant les enjeux en rapport au foncier et au développement urbain, arguant que "transformer l’existant, c’est à la fois un enjeu de sobriété foncière et de développement de nos villes pour les adapter aux nouveaux besoins et aux attentes des habitants, confrontés à des difficultés à se loger."
L’Assemblée nationale s’est montrée globalement enthousiaste par rapport à la proposition de loi et l’a adoptée à l’unanimité avec modifications le 7 mars 2024. Le Sénat a également majoritairement soutenu les mesures du texte, tout en les élargissant à d'autres types de bâtiments comme les hôtels, les bâtiments d'enseignement et les garages. Le texte a été adopté en première lecture le 22 mai 2024 par l’organe législatif.
La rapporteure Martine Berthet (LR) s’attend à la création d'un million de logements dans les zones commerciales d'entrée de ville datées grâce à l’adoption de cette loi.
La Commission Mixte Paritaire (CMP) mise en suspens
La prochaine étape pour la proposition de loi sera son examen par la Commission Mixte Paritaire (CMP). Cette commission, composée de sénateurs et de députés, a pour mission de trouver un accord sur un texte commun entre les deux assemblées. Ce processus est essentiel pour harmoniser les différentes versions adoptées par le Sénat et l’Assemblée nationale, afin de finaliser une législation applicable. La CMP devra travailler rapidement et efficacement pour respecter les délais fixés et permettre une mise en œuvre rapide des mesures.
Cependant, étant donné la dissolution de l’Assemblée nationale annoncée par le Président de la République le 9 juin 2024, le travail sur cette proposition de loi a été mis en suspens. Nous devrons donc attendre la mise en place du nouveau gouvernement pour que le texte puisse avancer.