
Tout comprendre à la garantie biennale
Également appelée "garantie de bon fonctionnement", la garantie biennale couvre le propriétaire contre tout défaut de fonctionnement des équipements d'un logement neuf. Valable durant deux ans, elle court à partir de la réception des travaux par le maître d’ouvrage. Mais que couvre-t-elle exactement et comment l'activer ? Les réponses dans cet article.
Qu'est-ce que la garantie biennale ?
La garantie biennale est prévue par l’article 1792-3 du Code civil. Elle impose au constructeur, pendant deux ans à compter de la réception des travaux, de réparer ou de remplacer tout élément d’équipement dissociable du gros œuvre qui ne fonctionne pas correctement :
« Les autres éléments d’équipement d’un ouvrage qui peuvent être enlevés ou remplacés sans détériorer la construction elle-même sont, pendant un délai de deux ans à compter de la réception de l’ouvrage, couverts par la garantie de bon fonctionnement. »
C. civ., art. 1792-3
Durée : 2 ans à partir de la réception
Le délai s’enclenche le jour de la réception des travaux, matérialisé par la signature du procès-verbal entre le maître d’ouvrage et les entreprises. L’article 1792-3 du Code civil précise que cette garantie court pendant deux ans à partir de cette date. Passé ce laps de temps, les équipements encore défaillants ne relèvent plus de la biennale ; ils basculent soit sous la responsabilité de l’occupant (entretien et usure normale), soit, pour les défauts structurels, sous la garantie décennale.
En pratique, il est donc essentiel pour le propriétaire de tester tous les équipements dès la remise des clés et de notifier par écrit tout problème détecté avant la fin du 24ème mois, afin de bénéficier pleinement de cette protection légale.
Que couvre la garantie ?
Pour mesurer la portée réelle de la garantie biennale, encore faut-il savoir quels organes du logement elle englobe. La règle est simple : tout élément que l’on peut retirer ou remplacer sans ébranler la structure entre dans son giron. Tour d’horizon, pièce par pièce, de ces équipements dits « dissociables ».
Équipements mécaniques et électriques
Volets roulants motorisés, portes de garage, VMC simple ou double flux, radiateurs, convecteurs, interphones et thermostats : autant d’appareils que l’on peut extraire ou remplacer sans toucher au gros œuvre. Leur bon fonctionnement relève donc de la garantie biennale.
Équipements sanitaires
Mitigeurs, colonnes de douche, chauffe-eau, WC, receveurs et siphons. Dès qu’une fuite, un entartrage anormal ou un défaut de réglage apparaît, l’entreprise doit intervenir pour restaurer l’usage prévu.
Menuiseries démontables
Portes intérieures, placards, portes-fenêtres, baies vitrées, poignées et serrures : tout ce qui se démonte sans atteinte à la structure est couvert. Un volet qui grince ou une serrure récalcitrante entrent pleinement dans le champ de la garantie.
Cas limites à apprécier
Certains équipements se situent à la frontière : ascenseurs privatifs, centrales domotiques, panneaux solaires fixés en surimposition. S’ils peuvent être déposés sans endommager la charpente ou la façade, ils relèvent de la biennale ; sinon, ils basculent sous la décennale. En cas de litige, c’est souvent le juge qui tranche, au regard de la possibilité technique d’un remplacement sans altération du bâti.

Ce que la garantie ne couvre pas
La garantie de bon fonctionnement ne prétend pas tout couvrir. Elle se concentre sur les équipements « rapportés » et laisse volontairement de côté ce qui touche à la solidité de l’ouvrage ou à l’usage normal par le propriétaire. Voici les frontières à connaître.
Les éléments indissociables du gros œuvre
Charpente, dalle, murs porteurs, toiture, isolation structurelle : dès qu’un composant ne peut être changé sans entamer la maçonnerie ou la structure, il échappe à la biennale. S’il se dégrade, c’est la garantie décennale de l’article 1792 du Code civil qui prend le relais, couvrant tout dommage compromettant la résistance de l’édifice ou le rendant impropre à sa destination.
Les désordres menaçant la solidité
Fissure traversante, affaissement de plancher, infiltration majeure, défaut d’étanchéité sur la toiture : autant de pathologies graves relevant d’emblée de la décennale. La biennale ne répare que la panne d’un volet ou la fuite d’un mitigeur ; elle ne traite pas les symptômes structurels susceptibles de mettre en péril l’ensemble du bâtiment.
Usure normale, défaut d’entretien ou usage abusif
Joints de silicone jaunis, chauffe-eau entartré faute de détartrage, volet détérioré par un choc : ces dégradations, imputables au temps ou à une mauvaise utilisation, n’ouvrent aucun droit à la prise en charge par l’entreprise. La jurisprudence rappelle qu’un constructeur n’est pas tenu de remplacer un équipement simplement vieilli, ni de réparer les conséquences d’un entretien négligé.
Point de départ : la réception des travaux
La garantie biennale naît le jour où le maître d’ouvrage réceptionne l’ouvrage, c’est-à-dire lorsqu’il signe le procès-verbal attestant que la construction est conforme et habitable. Le Code civil fait de ce moment un jalon essentiel :
« La réception est l’acte par lequel le maître d’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve ; elle met fin au contrat de louage d’ouvrage et fait courir les délais des garanties légales. »
C. civ., art. 1792-6
Le procès-verbal : le pivot juridique
- En VEFA (CCH, art. L. 261-1), il s’agit du procès-verbal de livraison signé avec le promoteur.
- En CCMI (CCH, art. L. 231-6), le document est établi entre le particulier et le constructeur.
- En marché de travaux ou auto-construction, la réception est un acte unilatéral du maître d’ouvrage, mais elle doit être formalisée par écrit et datée.
Sans ce PV, la date de départ reste incertaine ; en cas de litige, les tribunaux reconstituent la réception par faisceau d’indices (remise des clés, branchement des compteurs, etc.).
Effet domino sur les autres garanties
La réception « marque le point de départ des délais » des garanties légales :
« La réception fait courir les délais des garanties mentionnées aux articles 1792 [décennale], 1792-2 [dommages causés aux éléments d’équipement indissociables] et 1792-3 [garantie biennale], ainsi que celui de la garantie de parfait achèvement. »
Article 1792-6 § 7, Code civil
- Dès que le procès-verbal est signé (même avec réserves), la garantie de parfait achèvement est ouverte pour 1 an.
- Le même jour commence la garantie biennale de bon fonctionnement (2 ans) visée à l’article 1792-3.
- Le même jour encore s’enclenche la garantie décennale de solidité (10 ans) prévue aux articles 1792 et 1792-2.
Comment déclencher la procédure ?
Avant de faire jouer la garantie biennale, quelques étapes simples garantissent une prise en charge rapide : constater, notifier, laisser au constructeur un délai raisonnable, puis, si besoin, le mettre en demeure et saisir le juge. Voici la marche à suivre, point par point.
Constat du dysfonctionnement
Dès qu’un équipement dissociable (volet roulant, robinetterie, VMC, etc.) tombe en panne ou fonctionne mal dans les deux ans qui suivent la réception, le propriétaire relève le défaut : photos datées, numéro de série, notice d’entretien, tout justificatif utile.
Notification au constructeur ou au promoteur
Le propriétaire adresse ensuite une lettre recommandée avec avis de réception (ou un e-courrier suivi) rappelant :
- la date de réception des travaux ;
- la référence à l’article 1792-3 du Code civil (garantie de bon fonctionnement) ;
- la description précise du désordre constaté.
Cette notification fait courir le délai d’intervention du constructeur ; elle doit être expédiée avant l’expiration du 24ème mois suivant la réception.
Délai "raisonnable d'intervention"
Ni le Code civil ni le décret n° 78-40 ne fixent de durée chiffrée ; l’article 1792-6 évoque seulement des réparations effectuées dans un « délai fixé d’un commun accord ». À défaut d’accord, la jurisprudence apprécie le caractère « raisonnable » au cas par cas (nature du défaut, saison, disponibilité des pièces).
Mise en demeure
Si le professionnel garde le silence ou dépasse le délai convenu, on lui envoie une mise en demeure, toujours par recommandé, rappelant l’obligation légale et fixant une ultime échéance. Cette étape est indispensable avant tout recours judiciaire.
Les recours en cas d'inaction persistante
Référé devant le tribunal judiciaire : permet d’obtenir sous quelques semaines une ordonnance d’exécution ou la désignation d’un expert.
Code de procédure civile, art. 835 : le juge des référés peut ordonner « toutes mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ».
Expertise judiciaire : établit l’origine du défaut et chiffre la reprise.
CPC, art. 145 (mesures d’instruction avant tout procès) et art. 232 (nomination d’un expert lorsque « la solution du litige requiert une investigation technique »).
Exécution forcée ou dommages-intérêts : prononcés par le juge si le constructeur persiste à ne pas intervenir.
Code civil, art. 1221 (exécution forcée) ; art. 1222 (exécution aux frais du débiteur) ; art. 1231-1 (réparation du préjudice né de l’inexécution).
La loi impose à tout constructeur de souscrire une assurance de responsabilité civile décennale couvrant pendant 10 ans les dommages qui compromettent la solidité ou l'usage de l'ouvrage.
Si l'entreprise disparaît ou se trouve insolvable, c'est l'assureur décennal et non une simple RC Pro facultative qui indemnise directement le propriétaire pour les sinistres relevant de cette garantie Après avoir versé les fonds, l’assureur peut, le cas échéant, exercer un recours contre les autres co-responsables du chantier.
Qui règle la facture des réparations ?
Une panne d’équipement n’entraîne pas forcément de frais pour le propriétaire ; encore faut-il identifier le bon interlocuteur. Entre l’obligation légale du constructeur et les couvertures d’assurance, la chaîne de paiement suit un ordre précis qu’il vaut mieux connaître avant de lancer les réparations.
Responsabilité directe du constructeur
Aux termes de l’article 1792-3 du Code civil, le constructeur est tenu, pendant deux ans à compter de la réception, « du bon fonctionnement des éléments d’équipement dissociables ». Dès qu’un équipement couvert se révèle défaillant, il doit réparer ou remplacer à ses frais ; le maître d’ouvrage n’a pas à avancer le moindre euro.
L’assurance décennale obligatoire
Pour sécuriser la responsabilité de plein droit qui pèse sur eux, les entrepreneurs, artisans, architectes et promoteurs doivent obligatoirement souscrire une assurance responsabilité civile décennale (Code des assurances, art. L. 241-1).
Cette garantie couvre, pendant dix ans après la réception, l’indemnisation des désordres compromettant la solidité de l’ouvrage ou l’empêchant d’être utilisé normalement. Si l’entreprise est liquidée, refuse d’intervenir ou demeure silencieuse, son assureur décennal se substitue à elle pour financer les réparations, puis peut exercer un recours contre les autres intervenants éventuellement responsables.
Qui de l'assurance dommages-ouvrage ?
L’assurance dommages-ouvrage (ADO), imposée par l’article L. 242-1 du Code des assurances, préfinance exclusivement les sinistres de nature décennale : ceux qui compromettent la solidité ou l’usage de l’ouvrage. Elle ne couvre pas les pannes d’équipements visées par la garantie biennale.
Les bons réflexes dans les deux premières années
La garantie biennale est un filet de sécurité ; encore faut-il s’en servir avant qu’il ne se referme. Quelques gestes simples suffisent pour préserver vos droits et votre confort : tester, consigner, signaler sans tarder.
Passez chaque équipement au banc d’essai
Ne laissez pas filer les vingt-quatre mois : dès l’emménagement, actionnez volets, robinetterie, VMC, prises et interphone. Répétez ces vérifications à intervalles réguliers. Une panne détectée au-delà du délai biennal restera à votre charge.
Tenez un carnet d’entretien
Notez dans un classeur (ou une application dédiée) les dates de mise en service, d’entretien et d’éventuelles interventions. Conservez factures, notices et photos. Ce dossier technique prouvera votre diligence face au constructeur et, le moment venu, rassurera un futur acquéreur.
N’attendez pas le dernier moment pour notifier
Dès qu’un dysfonctionnement apparaît, adressez un courrier recommandé décrivant précisément la panne et proposant un calendrier d’intervention. Plus vous anticipez, plus vous laissez au constructeur le temps de commander des pièces ou de planifier un passage, évitant le bras de fer de la dernière minute.
Questions fréquentes sur la garantie biennale
Que couvre exactement la garantie biennale ?
Tout équipement « dissociable » : volets roulants, chaudière, VMC, robinetterie, serrures, interphone, radiateurs… bref, tout ce qu’on peut retirer ou remplacer sans attaquer la structure (article 1792-3 du Code civil).
Comment signaler une panne sous garantie ?
Envoyez au constructeur ou au promoteur une lettre recommandée (ou e-courrier suivi) décrivant le défaut, en rappelant la date de réception et l’article 1792-3. Conservez un double et les photos.
Que faire si l’entrepreneur ne répond pas ?
Après une mise en demeure restée lettre morte, saisissez le juge des référés ; il peut ordonner une expertise ou l’exécution forcée, et condamner l’entreprise à payer les réparations.
Un équipement remplacé repart-il pour deux ans ?
Non. La garantie biennale ne « repart » pas ; elle reste fixée à la date butoir initiale (24 mois après la réception). Seule la garantie commerciale du fabricant commence à courir sur la pièce neuve.